DIEU A LE $IDA
par Órion Lalli
Je suis Órion Lalli, né au Brésil en 1994, je suis artiste visuel, performeur, chercheur en arts du spectacle, acteur, fondateur et directeur du Grupo Tarto de Teatro (2013). J'ai commencé mon parcours dans le théâtre populaire à l'âge de 4 ans et depuis j’explore différents langages artistiques.
Depuis 2018, je développe le projet documentaire "EM.COITROS - Rencontres érotiques d'un corps vivant avec le VIH", où je codifie les récits actuels et dénonce l'effacement des personnes LGBTQIAP+. Je dénonce aussi les discours qui s'oppose au financement public du traitement médical des personnes qui, comme moi, vivent avec le VIH . Je m'interroge sur comment cela interfère dans mon rôle d'artiste, qui réclame l'urgence de dialoguer sur les politiques publiques dans le domaine de l'art.
Après avoir vu l'une des œuvres de cette recherche être censurée par deux députés conservateurs du Congrès national brésilien, j'ai dû répondre du crime de "diffamation religieuse" devant la justice brésilienne. J'ai reçu de nombreuses menaces de mort par la suite, qui se sont intensifiées après ma participation au webinaire "Speaking Truth to Power : Religious or Belief Minority Artists, Voice and Protest" à l'ONU. Aujourd'hui, j'ai été officiellement reconnu comme refugié politique par le gouvernement français.
Oeuvre censurée - Todes es Santes renommée #JeNeSuisPasUneDépense
Le VIH en tant que rite de passage, l’iconographie des rituels, et l'archétype de la religiosité constituent l'objet de ma recherche documentaire, où la matérialité du corps est l'un des sujets centraux. À partir de ce point de départ, des questions encore sans réponse se posent sur la manière dont le contrôle structurel du système restreint le droit à l'existence du corps public vivant avec le VIH ; sur comment l'évangélisation de l'espace public institutionnalise le contrôle sur les corps tout en partant d'un présupposé laïque ; sur la manière dont l'institution religieuse, aujourd'hui au Brésil, régit les décisions au-delà de la démocratie en plaçant son Dieu au-dessus de tout.
Le récit proposé dans l'exposition DIEU A LE $IDA vous dérange-t-il ?
Faisons un exercice - Et si ce Dieu, qui est à notre image et notre ressemblance, était diagnostiqué positif au Covid-19, ou au diabète, à l'hypertension, au cancer ? Cette réflexion narrative vous dérangerait-elle encore ? Si ce n'est pas le cas, cela en dit beaucoup sur la façon dont le VIH/sida est perçu comme quelque chose de déplaisant, d'irrespectueux et d'inconfortable à aborder.
Aujourd'hui les progrès pharmaceutiques sont si importants que la charge virale d'une personne vivant avec le VIH peut devenir "indétectable". Alors pourquoi la stigmatisation ne diminue-t-elle pas ? Pourquoi n'y a-t-il pas une "contamination de la connaissance" pour diminuer les préjugés ?
J'offre aux visiteurs deux espaces :
Le rez-de-chaussée accueille "DIEU A LE $IDA", une exposition hybride mêlant vidéos, installations et performances, réalisées au Brésil et en France, qui explorent le processus d'exil politique que je vis actuellement et les difficultés rencontrées par un corps pédé vivant avec le VIH dans le Brésil d'aujourd'hui, un pays de plus en plus intolérant, homophobe, transphobe, sérophobe, militarisé et rude.
L'étage au-dessus est utilisé pour poursuivre la création du spectacle documentaire Abattoir, qui sera présenté les 12/02 et 19/02.
ABATTOIR
Abattoir est le remake du spectacle "Part-ir do Corpo", dans lequel je propose une immersion dans les problèmes sexuels rencontrés par mon corps et par les corps qui sont l'antithèse de l'hétérosexualité et de la cisgénéralité. J'y codifie des récits actuels et je dénonce l'effacement et la violence à l’encontre de la population LGBTQIAP+, ainsi que le suicide et le corps comme chair/objet.
Un portrait du Brésil d'aujourd'hui où toutes les 46 secondes quelqu'un met fin à ses jours. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé en 2021, le suicide reste l'une des principales causes de décès dans le monde, représentant environ 700 mille personnes. Au Brésil, environ 12 mille personnes mettent fin à leurs jours chaque année, ce qui en fait la troisième cause de décès chez les personnes de 15 à 29 ans.
" Le cru, le nu, le dur érode la société hypocrite gavée de langage vain. Se corroder, c'est se casser. Orion, dans Abattoir, tue et broie, nu dans une innocence qui sourit, sournoise, défie, coupe la parole et le souffle. "
Bia Medeiros - en confinement, 2020.